mercredi 30 novembre 2011

MATTHEW GOOD BAND - Beautiful Midnight

S'il est un groupe des années '90 très injustement sous-estimé, c'est bien le Matthew Good Band. En 1999, la parution de l'album Beautiful Midnight par l'excellent groupe rock canadien Matthew Good Band dirigé, on s'en doute bien, par le grand et talentueux chanteur Matthew Good, attira l'attention des médias sur ce qui semble être avec raison le meilleur album du groupe, plus réussi que son très bon précédent album intitulé Underdogs. L'introduction de l'album est épatante. Dès le début de Giant, la première chanson de Beautiful Midnight, notre curiosité est piquée par un groupe de filles scandant un air de cheerleaders. Hello Time Bomb, la pièce qui suit, est le plus grand succès de l'album et un des morceaux les plus accrocheurs de Beautiful Midnight avec son tic tac de bombe à retardement. La première moitié de l'album est absolument excellente et mérite qu'on s'y arrête. Parmi les chansons de cette première moitié, mentionnons la superbe et très profonde chanson I Miss New Wave avec son atmosphère à trancher au couteau et son ambiance à se trancher les veines... Par contraste, la chanson qui suit I Miss New Wave et qui s'intitule Load Me Up est une pièce rock énergique qui n'exclut pas un ton sérieux. D'ailleurs, c'est la marque du Matthew Good Band d'aller droit au but dans son propos et d'aborder toutes ses chansons avec beaucoup de sérieux et de professionnalisme. L'émotion transparaît dans la voix de Matthew Good à chaque instant. Ce parti pris de sérieux dans toutes les chansons comporte toutefois un piège, celui de lasser l'auditeur par manque de fantaisie. Et effectivement, l'intérêt baisse un peu dans la seconde moitié de l'album. Faisons exception cependant de la chanson The Future Is X-Rated qui a de l'aplomb et s'avère fort accrocheuse ainsi que Born To Kill, vraiment très expressive (même si elle ne l'est pas autant que I Miss New Wave). Parmi mes chansons préférées de l'album, il y en a plusieurs mais je peux nommer I Miss New Wave, Failing The Rorschach Test et The Future Is X-Rated. C'est certain que Beautiful Midnight présente quelques lacunes, comme ce manque de fantaisie dans sa seconde partie ou son manque de variété dans l'instrumentation et la réalisation. Mais l'émotion qui se dégage de l'album est remarquable et ne fait jamais défaut. Comment passer sous silence la fin de la chanson Born To Kill avec sa montée cacophonique et sa note aiguë finale qui se veulent être un clin d'oeil à la fin de l'album Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band des Beatles que j'ai critiqué précédemment (voir ma critique de Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band du 26 novembre 2011)? Pour quiconque s'intéresse au rock canadien ou au rock des années '90, Beautiful Midnight est un must et trouvera sa place dans toute bonne discothèque. La musique du Matthew Good Band vous hantera pour des jours à venir et vous y reviendrez comme à une étrange drogue...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 26 novembre 2011

THE BEATLES - Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band

Aimez-vous la drogue? Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band a été écrit par une bande de drogués. Paul, John, George et Ringo étaient sous l'emprise de stupéfiants lorsqu'ils créèrent le plus fabuleux album de tous les temps. Peut-être avaient-ils bien consommé du LSD comme le suggèrent les initiales de leur chanson Lucy in the Sky with Diamonds. C'est Timothy Leary qui devait être bien content. En tous cas, une chose est sûre, c'est que cet album des Beatles a changé le cours de l'Histoire de la musique et de l'Histoire tout court. Cet impressionnant et ambitieux album-concept se propose de défier les barrières entre la culture populaire et la culture savante et de concurrencer la musique classique occidentale. Même la pochette de l'album de 1967 est un événement car on y voit les quatre membres des Beatles en compagnie de personnages célèbres de différents niveaux de culture, de classe sociale. C'est ainsi que Karl Marx et Albert Einstein y côtoient Marilyn Monroe et Laurel & Hardy. Musicalement, l'album explore et expérimente également entre pop music et musique classique contemporaine en introduisant des sons étranges et des bruits divers. D'ailleurs, un autre personnage qu'on aperçoit sur la pochette est nul autre que Karlheinz Stockhausen en personne, un compositeur de musique contemporaine de réputation internationale, une sorte de Beethoven des temps modernes. C'est au carrefour d'influences éclectiques parfois contradictoires mais toujours parfaitement intégrées à l'ensemble que se situe cet album étonnant. C'est ainsi que la musique psychédélique, le classique contemporain, la musique de cirque, le hard rock et le tabla indien se retrouvent tous réunis sur le même album sans que l'ensemble des chansons ne semble dépareillé. Comment peut-on enchaîner Within You Without You, une pièce de musique indienne composée par George Harrison, avec la pièce de clarinette When I'm Sixty-Four? Mais les Beatles l'ont fait, prouvant qu'ils pouvaient tout se permettre. À la fin de A Day In The Life, la dernière chanson de l'album, on entend une montée cacophonique d'instruments d'orchestre suivi d'un accord libérateur des tensions accumulées. L'effet est tout simplement saisissant. Ensuite, il y a un ultrason qui a été placé là, paraît-il, pour que les chiens se mettent à aboyer en l'entendant. C'est que les chiens n'ont pas le même spectre auditif que les êtres humains. Puis la célèbre boucle à répétition clôt l'album, un clin d'oeil à la musique classique contemporaine. La première fois que j'ai entendu Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band, j'ai senti un grand frisson me parcourir l'échine. Encore aujourd'hui, je me sens toujours un peu bizarre après chaque fois que je l'écoute. C'est un chef-d'oeuvre absolu, un morceau monumental de la culture pop, une oeuvre d'art intemporelle et un sommet de toute la musique du vingtième siècle. Encore mieux, Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band est le meilleur album des Beatles, le meilleur album des années '60, le meilleur album depuis l'invention du rock'n'roll et le meilleur album de toute l'Histoire de l'Humanité, point final.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 20/20

samedi 19 novembre 2011

RICHARD ASHCROFT - Alone With Everybody

Après le succès retentissant de son excellent groupe The Verve, le génial Richard Ashcroft tenta l'aventure d'un album solo. Le résultat en est Alone With Everybody, paru en l'an 2000. Malgré la fin de The Verve, Richard Ashcroft semble en bonne forme dans la composition et l'interprétation de ses chansons. C'est ainsi que pour A Song For The Lovers et pour I Get My Beat, les deux chansons qui débutent superbement l'album, Richard Ashcroft procède par l'exploration psychologique fine des sentiments. Brave New World est une oeuvre élégiaque d'un lyrisme grisant. Dans New York, il introduit une scansion. Le refrain est scandé sur un rythme irrésistible jusqu'à produire un effet hypnotique. Les quatre chansons que je viens de citer sont les quatre premières de l'album et aussi mes quatre préférées. Mais le reste n'est pas à dédaigner et présente des chansons dignes d'intérêt. Partout, les arrangements sont riches et subtils. On y entend entre autres un orchestre à cordes, de la flûte, de la trompette avec sourdine, de la trompette sans sourdine, du saxophone, de l'harmonica, de l'orgue, du piano et bien sûr de la batterie, des guitares et du chant. Mais tous ces instruments ne sont pas mis en valeur, ils sont plutôt fondus dans la texture sonore. D'ailleurs, Alone With Everybody présente un professionnalisme certain, une connaissance sûre du métier. Les arrangements sont superbes et fort attachants. Il y a de bonnes ballades country comme You On My Mind In My Sleep et Slow Was My Heart. Ailleurs, Richard Ashcroft louvoie entre folk et pop pour notre plus grand plaisir. Il y a des chansons plus rythmées comme Money To Burn et C'mon People (We're Making It Now). L'album est diversifié et intelligemment structuré. On ne peut trouver aucune mauvaise chanson sur cet album généreux qui dure une heure. Il n'y a que onze chansons mais elles sont assez longues, ce qui revient à près de 5½ minutes par chanson. Richard Ashcroft prend son temps pour établir l'ambiance et nous convaincre de se laisser transporter avec lui par l'ivresse de ses pièces magnifiques. Alone With Everybody est un album intéressant et bien qu'il ne soit pas certain que vous l'aimiez si vous avez apprécié Urban Hymns, l'album à succès de The Verve, il est quand même probable que vous tombiez ici sous le charme de Richard Ashcroft. Je recommande définitivement l'acquisition de cet album.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 12 novembre 2011

RADIOHEAD - Pablo Honey

Il est difficile de faire la critique de Pablo Honey en faisant abstraction de l'évolution ultérieure de Radiohead. Le groupe de Thom Yorke est en effet allé si loin sur ses albums suivants que Pablo Honey paraît mièvre en comparaison. D'ailleurs, Thom Yorke a même déclaré qu'il reniait cet album, son premier opus. En fait, Pablo Honey vaut surtout pour son succès Creep, une ballade poignante qui ressort nettement de cet album plutôt moyen. Creep est d'ailleurs repris à la fin de l'album dans sa version censurée. C'est que la version originale contient l'expression controversée "fucking special" alors que l'autre version qui apparaît sur une piste cachée après Blow Out en est expurgée. Avec Pablo Honey, Radiohead semble tiraillé entre la volonté de bien faire un album avec un potentiel commercial et celle d'expérimenter des idées musicales. Par ailleurs, Pablo Honey présente quelques lacunes d'inspiration. Par exemple, l'intro et le couplet de Anyone Can Play Guitar sont superbes mais le refrain est complètement raté. Dommage car cela aurait fait une excellente chanson. D'autre part, certaines chansons ont tendance à se ressembler comme Lurgee qui est totalement superflue. Mais Pablo Honey a quand même des chansons fort intéressantes. À part Creep, mes chansons préférées sont Prove Yourself et surtout Blow Out qui annonce déjà The Bends. D'ailleurs, Pablo Honey est un peu en avance sur son temps en étant un des premiers albums britpop à être sorti en Angleterre. Paru en 1993, il devance d'un an Parklife de Blur et Definitely Maybe de Oasis, deux albums incontournables du genre parus en 1994. Est-ce que Pablo Honey mérite qu'on le renie? Je ne le pense pas car il a pour lui de bonnes chansons britpop et puis surtout il y a Creep. Si j'avais à choisir entre Kid A, OK Computer et Pablo Honey, je ne prendrais probablement pas Pablo Honey, mais si on ne connaissait pas les autres albums de Radiohead, on se dirait que c'est finalement un bon album tout à fait convenable.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 14/20

samedi 5 novembre 2011

LIZ PHAIR - Exile In Guyville

Qui est cette fille au ton impertinent qui apporta un vent de fraîcheur en 1993 avec son album Exile In Guyville? C'est Liz Phair! Bien qu'elle n'ait jamais réussi à faire carrière dans l'industrie de la musique commerciale, elle fit sensation dans les milieux alternatifs. Le titre Exile In Guyville est une référence explicite à l'album blues Exile On Main Street des Rolling Stones. Pourtant, cet album de Liz Phair est bien moins blues et puise ses influences plutôt dans le rock classique. Il oscille entre rock classique et rock alternatif, allant dans ce dernier cas de la musique expérimentale à Patti Smith. Des chansons comme 6'1", Never Said et Mesmerizing sont tout à fait classiques alors que Canary ose explorer un peu plus avec son piano détimbré et que Flower est carrément expérimentale. La musique de Liz Phair agit comme une succession de petits paysages musicaux. Il y a 18 chansons pour 56 minutes de musique, ce qui revient à près de 3 minutes par chanson. Il y a bien des chansons plus longues comme Shatter qui dure 5½ minutes et qui bénéficie d'une longue introduction à la guitare mais, en général, les pièces sont brèves et font donc penser à de petites miniatures se succédant une après l'autre. L'art de Liz Phair consiste à varier ses chansons et renouveler constamment l'intérêt. Aucune des 18 chansons ne ressemble à une autre et nous fait voyager dans un monde musical particulier. Quant aux textes, ils sont parfois tourmentés, parfois choquants comme par exemple Fuck And RunLiz raconte ses déboires amoureux et Flower qui est carrément obscène et provocant. En ce sens, elle s'inscrit dans le courant de nouvelles chanteuses rock féministes avec du cran et de l'audace qui ont vu le jour durant les années '90. Si vous aimez les textes croustillants, vous serez servi avec Exile In Guyville. Le sexe n'est pas seulement suggéré, il est explicitement évoqué. Cette revendication du droit pour les filles de parler de sexe et d'avoir du sexe fit de Liz Phair une chanteuse considérée comme féministe. Toute l'astuce de Liz Phair est de faire du neuf avec du vieux en réinventant le rock classique pour en faire quelque chose de dépoussiéré, de résolument moderne et actuel grâce à des mélodies accrocheuses et des propos controversés. Bien que datant de 1993, Exile In Guyville s'écoute encore fort bien aujourd'hui. Liz Phair est une chanteuse authentique et prolifique qui nous gratifie ici de 18 chansons pleines de fraîcheur et d'impertinence. Que demander de mieux?

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 17/20