samedi 6 février 2016

PROTEST THE HERO - Fortress

Protest The Hero est un groupe ontarien de metal assez déroutant. Certains considèrent que leur album Fortress en est un de metal progressif et je peux comprendre pourquoi ils avancent cela mais moi, je décèle plutôt du post-hardcore, voire du metalcore, et certainement du math metal dans leur musique. Fortress est déroutant parce que Protest The Hero a une façon de penser la musique qui l'éloigne de la structure habituelle de la musique commerciale, ce qui fait en sorte qu'on identifie le groupe au style progressif. En fait, Fortress nous fait perdre tous nos points de repère, nous aventurant avec lui dans une épopée musicale extraordinaire. La musique de Protest The Hero est exubérante, voire extravagante, et le chanteur semble avoir un tempérament histrionique hors du commun. Les chansons de Fortress vont dans toutes les directions, pas du point de vue du style mais du point de vue formel, de l'enchaînement des idées musicales, créant ainsi ses propres structures musicales. Les idées abondent jusqu'à la saturation de ce qui est possible de mettre dans un morceau de musique, surprenant sans cesse l'auditeur qui peine à s'y retrouver. Protest The Hero passe ainsi d'une idée à l'autre aussi vite qu'il faut pour le dire, jetant rapidement tout ce qui précède aux orties et s'embusquant sans ambages dans une nouvelle logique de chanson, répétant ainsi ce schéma sans relâche du début à la fin. Car bien que maints critiques et autres experts de musique rock et metal aient encensé l'album à sa parution en 2008, je dois me faire plus circonspect que ces bien-pensants: je ne suis pas toujours la logique qui unit ce fatras d'idées et de mélodies. Il semble que Protest The Hero veuille à tout prix confondre son public sur la suite logique qui prévaudrait dans sa musique, l'amenant à cumuler les riffs diaboliquement virtuoses et les mélodies impossibles sans se soucier de la structure formelle que peut prendre chacun des morceaux de son album. Je suis donc partagé sur l'art de Protest The Hero: j'admire l'inventivité rythmique et mélodique de sa musique mais je déchante sur le sens que tout cela est supposé prendre. À trop vouloir épater la galerie, Protest The Hero se perd en chemin et on ne retient rien de son opus Fortress. À force d'outrances, le groupe finit par noyer le poisson. En d'autres termes, ce parti pris évident de la démesure et de la complexité finit par lasser. D'ailleurs, après une vingtaine de minutes, on n'écoute plus la musique car tout sonne pareillement extravagant sans que rien n'émerge de l'ensemble. Il faut une dose de concentration surhumaine pour survivre à l'épreuve que consiste l'audition attentive de Fortress dans son ensemble! Et pourtant, on ne peut qu'être subjugué par un tel tour de force. Les riffs sont virtuoses jusqu'à l'époustoufle, la musique d'une incroyable complexité mélodique et rythmique laisse carrément pantois et le chanteur a une personnalité fantasque et démesurée digne de feu Freddie Mercury (1946-1991). Si seulement Protest The Hero pouvait se ressaisir et composer de vraies chansons... Une autre formation bien reconnue pour son humour outrancier dans sa musique, System Of A Down, compose elle aussi des sections fortement contrastées et imprévisibles sans pour autant donner la moindre impression de gratuité ou d'illogisme. Sa musique est très bien charpentée et conséquente avec elle-même, comme on peut notamment le constater sur Hypnotize, son dernier album en date (voir ma critique de Hypnotize du 25 octobre 2014). Il serait d'ailleurs temps en passant que System Of A Down nous ponde un autre chef-d'œuvre. Protest The Hero devrait donc en prendre de la graine comme on dit familièrement, puisqu'il ne faut guère de doute qu'il a pour lui beaucoup de talent et une maîtrise technique indiscutable. Il n'empêche que je ne peux pas aimer Protest The Hero. Comme le disait l'empereur Joseph II à Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) concernant un de ses plus grands opéras: "il y a trop de notes". La seule différence, c'est que Protest The Hero n'est pas Mozart...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 14/20

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