samedi 26 mars 2016

OTEP - House Of Secrets

La couverture très particulière de l'album House Of Secrets de la formation californienne Otep (en fait, c'est le nom de la chanteuse du groupe puisque elle se nomme Otep Shamaya) laisse présager que son contenu sera lui aussi fort pittoresque et en effet, c'est bien le cas. House Of Secrets n'est pas un album metal ordinaire: il y a très peu de musique et beaucoup de bla-bla poétique et déprimant, du genre "ma vie est cauchemardesque"... En réalité, sur les douze titres qui figurent sur cet album que nous présente Otep (à ne pas confondre avec le groupe suédois Opeth), il n'y a que Warhead, Sepsis (à ne pas confondre avec Pepsi, le concurrent de Coke), Hooks & Splinters, Self-Made et peut-être aussi Suicide Trees qui peuvent être qualifiés de morceaux de musique. Tout le reste n'est que du bavardage, ce qui déstabilise si on s'attend à écouter un album de musique metal. Mais comme l'illustration de la couverture d'album que l'on aperçoit ici nous prépare psychologiquement à remettre en question nos habitudes d'écoute, il est possible que l'on soit agréablement surpris à l'écoute de ce que nous offre Otep. En passant, ce n'est pas exactement la même couverture que celle de mon album car le mien a une mention Copy Controlled au-dessus du logo Parental Advisory. Trêve de bavardage, qu'en est-il de la musique que nous joue Otep? Il y a parfois de véritables éruptions d'agressivité tandis qu'ailleurs la voix n'est que murmurée, jouant sur les contrastes de manière fort théâtrale. Du point de vue du style, je dirais que cela me fait penser un peu à Staind, notamment son album Dysfunction que j'avais apprécié (voir ma critique de Dysfunction du 21 mars 2015). Il n'y a cependant pas à s'énerver pour si peu. Ce n'est pas du metal particulièrement original ni passionnant mais l'intérêt n'est pas là. Il réside plutôt dans la démarche artistique qu'adopte Otep en créant une sorte d'album-concept comme c'est le cas avec The Who et son opéra-rock Quadrophenia ou encore Pink Floyd et son chef-d’œuvre The Wall. On le voit, Otep a beaucoup d'ambition. Malheureusement, House Of Secrets rate sa cible en se cantonnant dans une sorte de délire presque masochiste et certainement complaisant sur sa douleur de vivre car sa rhétorique est déjà vue et entendue. L'album aurait pu être prometteur si Otep avait un propos original à raconter, d'autant plus que la musique en est pratiquement absente. Otep se lance dans une logique mais semble incapable de concrétiser sa vision artistique. Néanmoins, malgré l'indigence de la musique et des paroles, House Of Secrets est un album plutôt curieux et finalement étonnant, avec une ambiance certes pittoresque telle que le préfigurait la couverture de l'album. La chanteuse Otep Shamaya ne cesse de geindre et gémir, ce qui me rappelle le rare et incroyable album Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner de Necrofrost (voir ma critique de Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner du 12 mars 2016)! Il est cependant assez difficile de concurrencer Necrofrost pour ce qui est du gémissement et encore là, Otep nous laisse sur notre appétit. Malgré tout, ce n'est donc pas un album horrible, même si l'ensemble est un peu prétentieux et qu'on souhaiterait en avoir plus, et juste pour le courage d'avoir voulu être différente, la formation Otep ne mérite pas une mauvaise cote de ma part. House Of Secrets d'Otep est un album non conventionnel, faussement révolutionnaire peut-être mais tout de même agréable à découvrir, mais je ne peux pas pour autant le conseiller à tout le monde. Si la couverture de cet opus d'Otep vous plaît et que vous vous sentez apte à recevoir un album tordu en pleine poire, il saura possiblement vous charmer mais c'est un risque que seul vous-même êtes capable de prendre... Il ne me reste plus alors qu'à vous souhaiter bonne chance!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 15/20

samedi 19 mars 2016

ARTROSIS - Fetish

J'ai à vous proposer cette semaine un groupe plus connu que celui que j'ai critiqué la semaine passée mais pas beaucoup plus. Il s'agit d'un groupe de rock gothique polonais surtout connu dans son pays d'origine, j'ai nommé la formation Artrosis avec son album paru sous étiquette Metal Mind Records en 2001 et intitulé Fetish. Malgré ce titre qui peut faire penser à l'anglais, Artrosis chante toutes les pièces qui composent son album dans la langue polonaise, ce qui fait en sorte que je ne comprends pas un seul mot de ce qu'il raconte. Il reste néanmoins la musique et ce que je peux en juger est qu'il s'agit d'un très bon album. J'aime bien le metal industriel et le style gothique même si je suis avare de mes critiques en le domaine. Le metal gothique a survécu davantage que le metal industriel au passage du millénaire. Le genre industriel n'est pas toujours très bon quand il est perpétré au 21e siècle. C'est le cas malheureusement de l'album industriel Animosity de Sevendust paru en 2001, soit la même année que l'album gothique Fetish de Artrosis, et dont j'avais fait une critique mitigée sur ce blog (voir ma critique de Animosity du 1er novembre 2014). Le style gothique semble plus intéressant. Quand il est chanté par une fille, comme c'est le cas pour Artrosis, c'est encore mieux car je suis un fan des jolies voix féminines dans le metal. Elle s'appelle Medeah et cette jolie chanteuse aux cheveux blonds sait très bien exprimer ses diverses intentions avec sa voix. Par exemple, l'album débute avec la pièce-titre Fetish Medeah lance une sorte de cri qui attire immédiatement l'attention. Sur la pièce suivante Druga Twarz, il y a un petit quelque chose de narquois qui rend la pièce plutôt sexy malgré une langue aussi rebutante que le polonais. Fetish démarre donc sous d'heureux auspices et la suite présage que ce sera de bon augure. L'album de Artrosis commence donc de manière intéressante mais la troisième chanson intitulée Zniewolona Myśl semble contenir une mystérieuse erreur puisque à la reprise du refrain, le début de la phrase est tronqué de façon inexplicable. De plus, Artrosis se permet de se lancer dans une phase exploratoire vers le milieu de l'album avec le morceau Samuel dont on ne comprend pas toujours où le groupe s'en va avec ses skis dans le bain. Il n'empêche que la pièce qui succède immédiatement Samuel, la fort belle Zatruta, a pour elle une guitare magnifique et se classe possiblement en tant que ma préférée sur Fetish. L'album termine avec deux brèves pièces, Cosmos qui est un morceau instrumental ressemblant à un interlude et Ostatni Raz. Il n'y a en tout que neuf titres sur l'album de Artrosis mais je possède l'édition d'origine en polonais. L'album Fetish a été par la suite lancé avec davantage de chansons en Pologne et il existe même une version en anglais pour le gros marché américain sans doute, ce que je déconseille bien sûr. Le polonais apporte une incomparable touche originale que l'anglais ne peut concurrencer. Il faut dire que la musique est pas mal originale elle aussi, avec tous ses petits sons de synthétiseurs et de percussions électroniques qui contribuent au style de Fetish. La présence de la guitare électrique est sporadique et laisse plutôt la place aux claviers. Il n'y a rien d'agressif sur l'album de Artrosis et ce sont les ambiances qui sont mises plutôt en vedette. C'est assurément un album à conseiller aux amoureux du metal gothique, une découverte que je suis heureux de partager avec vous. Artrosis est une formation qui mériterait d'être connu davantage, raison pour laquelle je vous en parle en espérant que vous tomberez vous aussi sous le charme de la belle Medeah...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 12 mars 2016

NECROFROST - Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner

Il serait assez difficile de trouver plus obscur que l'album de black metal de Necrofrost qui s'intitule Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner et qui est paru en 2001. Obscur parce que d'une part, c'est un groupe relativement peu connu hors des circuits underground du black metal, mais obscur aussi parce que les thèmes et la musique sont absolument sombres et cauchemardesques comme seul le black metal sait l'être. D'une certaine façon, Necrofrost représente l'archétype de ce que le black metal a de plus tordu et malsain à offrir, et c'est l'auditeur qui reçoit la décharge en pleine figure. Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner n'est pourtant pas un album très agressif, du moins relativement; c'est plutôt une œuvre dont la sensibilité est nihiliste et déprimante jusqu'au bout des ongles, obligeant l'auditeur à vivre des sensations fortes par le style, l'ambiance et l'émotion perpétrés par ses créateurs. Necrofrost ne veut surtout pas connaître du succès commercial, contrairement notamment à Dimmu Borgir dont j'ai écrit la critique pour son album Enthrone Darkness Triumphant la semaine dernière (voir ma critique de Enthrone Darkness Triumphant du 5 mars 2016), du moins si l'on en juge par le son lo-fi de sa musique volontairement mal enregistrée, la chanson Me The Tundra de Necrofrost étant même coupée à la fin si brusquement que l'on se demande s'il s'agit ou non d'une erreur, comme pour bien statuer son positionnement underground, ainsi que sa présentation matérielle vraiment déficiente. Le livret traditionnel est ici remplacé par un simple feuillet qui semble avoir été mal photocopié en noir et blanc tel qu'illustré ci-contre, l'endos du feuillet ne comportant aucune information pertinente en dehors des paroles de deux chansons, Me The Tundra ainsi que Raw Ravens Journey. Quant à l'endos de l'album lui-même, il figure de mauvaises photographies de trois membres de Necrofrost qui ressemblent à des possédés de Satan, dont le chanteur Seirim qui oscille par son chant apocalyptique entre les gémissements du damné aux enfers et les vociférations du démon, avec les titres des neuf morceaux composant Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner. À part cela, aucune information pertinente sur Necrofrost ou sur l'album lui-même, outre le fait que l'enregistrement ait eu lieu, en dépit de sa parution en 2001, entre septembre et octobre 1997 puis entre février et juin 2000. Aucune explication concernant le hiatus entre les deux périodes d'enregistrement de l'album par Necrofrost, ni moyen de contacter le groupe hormis une adresse douteuse de boîte postale en Suède alors que le groupe serait plutôt originaire d'Allemagne. Beaucoup d'incertitude donc, ce qui curieusement rend la chose mystérieuse et plus intéressante sur la petite histoire de Necrofrost. Car pour ce qui est d'épouser les atmosphères envoûtantes et glauques du black metal le plus pur (ou le plus impur), Necrofrost est absolument épatant et assez difficile à surpasser, croyez-moi sur parole. La musique est pourtant construite le plus souvent de manière assez simple, répétant à profusion un riff lancinant jusqu'à obtenir un effet hypnotique, réinventant comme bien souvent dans le genre black metal les structures de chansons habituelles du metal commercial, comme c'est particulièrement le cas entre autres de la pièce My Winter Of Forgotten Souls. Il n'y a que neuf morceaux sur l'album de Necrofrost mais la première pièce intitulée Veistu Hve Blota Skal (ne me demandez pas ce que ça peut bien signifier, je ne sais même pas de quelle langue il s'agit) est davantage une introduction à l'album que d'une chanson amusante à fredonner et Thulecandra est un morceau purement instrumental. La pièce qui suit Thulecandra est totalement contrastante, une chanson au titre pas très sympa et rigolo, Slaughtered With Misanthropic Intent, épouvantable et infernale comme on les aime. Comme partout ailleurs, Seirim crie et gémit sur ce titre, tout comme la suivante pas trop jojo The Return Of Animalian Bloodlust. Cependant, même si tout l'album est parcouru des horribles cris et gémissements démoniaques de Seirim et que le style soit impeccable du point de vue black metal, on se lasse un peu vers la fin de l'album, surtout à cause d'une trop grande redondance entre les morceaux. Peu importe, l'album Bloodstorms Voktes Over Hytrunghas' Dunkle Necrotroner de Necrofrost mérite largement qu'on s'y arrête si vous pouvez dénicher cette rareté discographique, à cause de l'intégrité artistique et de la folie d'un tel groupe et d'un tel album, pour moi ne faisant aucun doute qu'il s'agisse d'une œuvre puissante que j'adore réécouter pour me foutre les jetons et ainsi clamer que j'ai écouté de la véritable musique démoniaque par cette bande de psychopathes...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 17/20

samedi 5 mars 2016

DIMMU BORGIR - Enthrone Darkness Triumphant

En 1997, la formation norvégienne Dimmu Borgir frappa dans le mille avec son stupéfiant album black metal intitulé Enthrone Darkness Triumphant. Il s'agit d'un petit chef-d’œuvre lorgnant avec la musique gothique en raison de la présence extrêmement envoûtante des claviers et des synthétiseurs, mais résolument black metal quant aux guitares pesantes et à la batterie sollicitant furieusement la grosse caisse. Le chant de Shagrath épouvante les cœurs les plus solidement accrochés avec sa grosse voix monstrueuse et le tempo des pièces est soit rapide et agressif, soit lent et près du doom metal. Mais ce qui fait tout l'intérêt de cet album génial de Dimmu Borgir, ce sont ses thèmes musicaux scandés à répétition comme une procession des damnés et ses harmonies modales mystérieuses et magiques. Il y a par ailleurs de fréquents changements de tempo et des structures de chanson peu communes et inédites. Les paroles sont glauques et sibyllines, le texte de la chanson Tormentor Of Christian Souls étant même interdit d'impression dans le livret de Dimmu Borgir par sa célèbre maison de disques Nuclear Blast! Oui vraiment, Enthrone Darkness Triumphant a tout pour plaire, aussi n'est-il pas étonnant qu'il ait remporté un franc succès en dépit de son format bien peu commercial. D'une certaine façon, on peut même dire que cet album de Dimmu Borgir est un classique du genre, un thriller black metal que tous les fans de ce style ambigu et malicieux se doivent de connaître. Une chose est sûre, il a permis à la désormais légendaire formation scandinave de se faire connaître, ce qui est bien sûr une fort bonne chose puisque Dimmu Borgir est un groupe dont l'excellence et la crédibilité ne sont plus jamais remises en doute. Quoiqu'il en soit, c'est un de mes albums black metal préférés, avec des chansons qui cognent comme Relinquishment Of Spirit And Flesh ou encore Tormentor Of Christian Souls, mais aussi des pièces plus modérées mais hautement inspirées et envoûtantes telles que Prudence's Fall et A Succubus In Rapture qui se retrouvent à la toute fin de l'album. Le climax est d'ailleurs atteint avec Prudence's Fall, ma favorite, mais c'est sans compter une merveilleuse pièce cachée qui n'est pas mentionnée à l'endos de l'album et qui termine ce superbe album de Dimmu Borgir de fort belle façon, l'imprononçable Raabjørn Speiler Draugheimens Skodde (le groupe chantait d'ailleurs dans sa belle langue natale avant la parution de Enthrone Darkness Triumphant)! J'adore Dimmu Borgir et un album aussi atypique que Enthrone Darkness Triumphant n'est pas sans me rappeler un autre album metal singulier paru la même année et que j'affectionne également, l'incroyable Angels Fall First de Nightwish (voir ma critique de Angels Fall First du 5 décembre 2015). Il y a une approche gothique sur les deux albums et ce sont tous les deux des œuvres qui ont marqué leur époque et fait évoluer la musique metal qui ne se limite pas au thrash metal ou au death metal, même si je respecte beaucoup tous ces styles. Pourtant, Nightwish et Dimmu Borgir ne se ressemblent pas du tout, surtout parce qu'ils sont trop originaux pour se plagier l'un l'autre. Non, il semble que 1997 ait été simplement une année à la croisée des chemins pour que naissent des albums aussi novateurs que Angels Fall First et Enthrone Darkness Triumphant. Peu importe, il est essentiel près de vingt ans plus tard de redécouvrir ces albums, ce que je vous enjoins de faire expressément. Il est tout naturel que je réserve une cote fabuleuse pour un album aussi extraordinaire que Enthrone Darkness Triumphant de Dimmu Borgir, un sommet du genre black metal qui a, fait rare dans le domaine, connu un succès virulent dans le monde entier qui ne s'est depuis point démenti.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 18/20