samedi 28 avril 2018

ESTHERO - Everything Is Expensive

En 2012, l'Ontarienne Esthero fit paraître un album mal-aimé des critiques, Everything Is Expensive. S'il est vrai que cet album controversé ne ressemble pas à ses prédécesseurs, qu'en est-il réellement de sa qualité artistique? Pour vous cette semaine, je me penche sur cette question épineuse. Everything Is Expensive est un album très organique, utilisant principalement des instruments acoustiques pour son tissu musical. L'album débute de manière très dépouillée, laissant la place à la voix d'Esthero. Il est un fait assez évident à l'écoute de Everything Is Expensive que Esthero a une fort belle voix et qu'elle la maîtrise parfaitement. De plus, Esthero a du métier et Everything Is Expensive n'est certainement pas un album bâclé. Alors qu'est-ce qui turlupine les critiques à ce point? Seraient-ils de mauvaise foi? Les albums précédents d'Esthero étaient très bons mais Everything Is Expensive va dans toutes les directions, empruntant au passage le style d'autres artistes. Ainsi, la chanson rock Supernatural ressemble à du très mauvais P!nk du temps où P!nk chantait du rock, la pièce laconiquement intitulée Go pourrait figurer sur l'album Cry de Faith Hill tant le style est identique (voir ma critique de Cry du 23 juin 2012), How Do I Get You Alone? évoque pour moi irrésistiblement la formation espagnole Mecano qui avait connu un succès planétaire avec Hijo de la Luna, etc... Je pourrais continuer longtemps mais je ne passerai pas en revue les treize titres que comporte l'album d'Esthero afin de ne pas être fastidieux à lire. Non, il n'est pas nécessaire d'être un grand devin pour comprendre que Everything Is Expensive présente un manque sérieux d'originalité. Des pièces comme Francis et Crash en duo avec Jonah Johnson sont de surcroît tout à fait oubliables, d'ailleurs je ne m'en rappelle pas. Qui plus est, Esthero se contredit parfois elle-même sur son album, comme la chanson Gracefully où elle déclare qu'elle entend vivre sa vie avec grâce et élégance mais chante à quelqu'un dans la pièce suivante "why don't you just go fuck yourself" et prétend ne pas lui accorder de chanson dans sa chanson qu'elle a composée pour lui... Ce pourrait être drôle à la limite mais Esthero est très sérieuse, trop sans doute. Le résultat est cet album fort inégal, avec des chansons vraiment minables (je n'en reviens pas de la médiocrité de Supernatural) mais aussi des pièces heureusement potables (j'aime assez Never Gonna Let You Go ainsi que la pièce-titre). Je comprends le dédain des critiques pour cet album rempli de bonnes intentions mais raté, hélas! Cela peut paraître paradoxal mais en dépit du manque flagrant d'originalité, on sent malgré tout la forte personnalité d'Esthero, comme quoi elle demeure malgré tout une artiste intéressante qui nous a concocté avec Everything Is Expensive un album candide et attachant avec ses multiples défauts. Il est vrai que Gracefully, avec son introduction par des enfants, est une chanson plutôt attendrissante. Dans l'ensemble, je n'ai donc pas été déçu par cet album outre mesure même si je comprends les reproches qui lui ont été adressées, sans être enthousiasmé non plus. C'est un album qui a du bon et du mauvais, aussi faut-il prendre le bon et laisser tomber le mauvais...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 14/20

samedi 21 avril 2018

JEWEL - This Way

S'il y avait un équivalent de la chanteuse Lynda Lemay aux États-Unis, ce pourrait être Jewel. Avec ses jolies petites chansons pop folk où elle s'accompagne parfois seule à la guitare acoustique et ses paroles sincères et toujours intrigantes, Jewel s'est frayée un chemin dans le monde de la musique à la hauteur de son talent d'auteure-compositrice-interprète. Son troisième album studio This Way poursuit dans la même veine que ses prédécesseurs, avec une influence nouvelle pour la musique country. Cela est perceptible sur Everybody Needs Someone Sometime Jewel emprunte l'accent texan du Sud tandis que la chanson Cleveland pourrait même figurer sur l'album This Woman de LeAnn Rimes (voir ma critique de This Woman du 30 juin 2012)! Mais c'est surtout Love Me, Just Leave Me Alone qui le prouve en plongeant sans ambages dans le country rock, annonçant le virage country que prendra Jewel subséquemment. Il y a cependant aussi des pièces qui s'écartent du country sur l'album This Way, comme Serve The Ego avec sa touche exotique en raison de l'apport du tabla indien sur cette chanson ou encore I Won't Walk Away avec son magnifique accompagnement de cordes et de piano. On ne peut donc pas dire que Jewel soit linéaire, même si sa musique est rarement originale. L'intérêt de This Way réside plutôt en fait dans ses paroles ô combien pertinentes (allez écouter sa chanson The New Wild West) et parfois surprenantes ("They say that Jesus loves you / What about me") mais toujours charmantes à l'image de la chanteuse. Car il faut se l'avouer, Jewel a cette étincelle comme Lynda Lemay qui la distingue des autres chanteuses du même acabit. C'est la personnalité de Jewel qui est la vraie vedette de son album, bien plus que ses paroles et sa musique. Il n'est pas étonnant que bien des hommes craquent pour Jewel... J'avais été sévère avec l'album This Woman de LeAnn Rimes parce que c'est du country et que je trouve le country très réactionnaire. Je le regrette toutefois, car This Woman n'était pas un mauvais album et que j'aime secrètement le country. Je ne veux pas me l'avouer mais j'aime le folk et le country. Ce n'est pas aussi progressif et original que Sonic Youth et Radiohead mais merde, putain que j'aime ça le country! Je me suis mis à écouter du country dernièrement et vous pouvez être assurés que je vais en critiquer éventuellement. This Way de Jewel n'est peut-être pas à proprement parler un album de country mais quand elle flirte avec le style, l'effet est magique. Je vais donc accorder une cote supérieure à This Way qu'à This Woman, d'autant plus que ma cote pour This Woman est sous-évaluée. L'album This Way de Jewel, paru en 2001, est très très bon, avec en plus deux chansons live en bonus que je ne connaissais pas. Certes, This Way n'est pas trop avant-gardiste peut-être, mais merde, putain que j'aime Jewel!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 14 avril 2018

DIDO - No Angel

Eminem a le tour de nous dénicher de petites chansons sucrées à échantillonner dans ses propres chansons. C'est ainsi qu'il avait réussi à dépoussiérer un vieux succès des années '80 de la chanteuse Martika complètement oubliée de nos jours pour sa propre pièce Like Toy Soldiers. C'est aussi grâce à lui que Dido a connu son plus grand succès avec Thank You, échantillonné par Eminem dans sa pièce Stan. Plusieurs comme moi ont découvert Thank You à cause de Stan, et même si l'album No Angel de Dido sur laquelle se retrouve Thank You est assez solide pour garantir le succès de Dido, il n'est pas clair si elle aurait connu autant de succès sans Eminem. Autre chose qui n'est pas claire, l'album a été lancé en 1999 aux États-Unis et en 2001 au Royaume-Uni d'où Dido est originaire, mais je n'ai pas réussi à trouver la date de parution au Canada. No Angel est paru soit en 1999, soit en 2001, mais je ne peux pas trancher catégoriquement. C'est la raison pour laquelle j'ai classé cet album dans deux années différentes. Je me souviens que le clip Thank You passait en boucle en 2001 à la télé. C'est une chanson magnifique, mais il faut franchement écouter tout l'album pour prendre la mesure du talent de Dido. Sa voix douce et suave, avec un charmant petit accent britannique, fait merveille sur les onze titres que comporte son album No Angel, en plus d'une douzième piste en bonus beaucoup plus rythmée. Cette pièce intitulée Take My Hand durant six minutes et trois quarts pile-poil me fait personnellement penser à la chanson Children de feu Robert Miles, décédé l'année dernière. Le reste de l'album de Dido est plus tranquille mais nage dans les mêmes eaux, allant du trip hop à la dream pop pour notre plus grand bonheur. Le style est original, utilisant notamment les effets sonores que l'on peut retrouver lors d'un concert live. Cela est particulièrement vrai avec Honestly OK, une excellente chanson mélancolique presque expérimentale à force d'effets sonores, traitant de la solitude de Dido. Un autre petit chef-d’œuvre sur No Angel est la pièce Don't Think Of Me, vraiment poignante. J'adore la finale de la chanson avec ses gammes descendantes qui ont quelque chose évoquant la fatalité... À vrai dire, toutes les chansons de l'album sont excellentes et il serait fastidieux de les passer chacune en revue. Sachez simplement qu'on a là un album extraordinaire, d'une profondeur et d'une originalité admirables. Dido fait dans la pop adulte mais ce n'est pas là un défaut, bien au contraire. Il y a chez elle une maturité et un sérieux qui font défaut à bien d'autres artistes du spectacle. Elle est même meilleure que Adele. C'est là que je me suis rendu compte que je n'avais jusqu'ici critiqué des albums de musique adulte que fort rarement. Je n'avais d'ailleurs pas accordé une cote bien élevé à l'album de pop adulte de Faith Hill. Intitulé Cry, cet album pourtant remarquable s'avère avec le recul bien préférable à d'autres auxquels j'ai octroyé des cotes supérieures par la suite (voir ma critique de Cry du 23 juin 2012). Je regrette ma critique de Cry mais il est trop tard pour bien faire... Bref, si vous avez passé l'âge d'écouter de la petite "pop bubblegum" et que vous avez assez de maturité pour apprécier les artistes de pop adulte avec de la consistance, je vous suggère fortement Cry de Faith Hill ainsi que No Angel de Dido.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 17/20

samedi 7 avril 2018

JEM - Finally Woken

Si je vous dis Jem, est-ce que ça vous dit quelque chose? Et si je vous parle de la chanson They? Peut-être que de vieux souvenirs resurgiront dans votre mémoire... Bien oui! They de Jem a connu un certain succès au milieu des années 2000 et on retrouve cette pièce sur l'album dont je vous fais part cette semaine, Finally Woken. J'ai décidé de déterrer cet album sous la tonne de poussière sous laquelle il était enfoui parce que c'est un petit bijou qui ne se limite pas à un seul succès. En effet, They pourrait oblitérer le fait que toutes les chansons de Finally Woken pourraient être des tubes planétaires. Jem a enregistré ses chansons dans une petite chambre à coucher mais cela ne paraît pas du tout, tant le tout sonne professionnel grâce au choix des échantillonnages fort efficaces et judicieux. Ce sont véritablement onze chansons accrocheuses dont aucune n'est superflue, Finally Woken ne présentant aucun morceau de remplissage. C'est le genre d'album dont chaque pièce occupe une place importante qu'on ne peut changer sans compromettre la logique implacable de l'ensemble. Les rythmes sont empruntés tant au hip hop qu'au trip hop, mais la diversité des émotions et des styles rendent cet album de Jem absolument craquant. Par exemple, They a quelque chose évoquant la musique classique (en fait, il y figure un échantillonnage d'une pièce de Johann Sebastian Bach (1685-1750)) tandis que Save Me est résolument hip hop. Il y a même de la grosse guitare électrique sur Come On Closer, mais surtout sur la pièce laconiquement intitulée 24 qui fait irrésistiblement penser à Bring Me To Life de l'album Fallen du groupe Evanescence, paru à la même époque que Finally Woken, en raison du mélange de la guitare metal et du rythme hip hop (voir ma critique de Fallen du 27 juillet 2013). Rassurez-vous cependant, Finally Woken de Jem n'a autrement rien de metal. C'est bien le trip hop qui domine, à la façon des années 2000. La chanson Missing You est une œuvre triste qui vous fera verser une petite larme, me faisant dire que vous êtes bien insensible si vous demeurez stoïque devant cette musique vraie et sentimentale. Les deux pièces qui suivent Missing You sont par contre résolument joyeuses, créant un contraste étonnant. Notamment, Wish I est une musique de carte postale bien lumineuse. Mais avant tout, c'est surtout la candeur de la chanteuse Jemma Griffiths, sa désinvolture qui donne un charme indéfinissable à son album Finally Woken. Devant une telle simplicité désarmante, il serait bien difficile de prétendre que Jem manque de sincérité. Bien au contraire, on sent que Jem met tout son effort pour traduire exactement en musique les idées et les sentiments qu'elle a en tête. Bref, il est clair désormais que Finally Woken est un album dont vous ne pouvez plus ignorer l'existence, peu importe que vous connaissiez déjà ou non la chanson à succès They. J'aime Jem. Le jeu de mots est certes facile, mais ce n'est pas de ma faute s'il s'agit pourtant de la vérité! Finally Woken de Jem, paru en 2004, mérite absolument que je lui accorde une jolie petite critique sur mon blog. C'est maintenant chose faite.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20