samedi 24 novembre 2018

JOHNNY CASH - American IV: The Man Comes Around

Ce mois de novembre est consacré à des albums country mais j'ai seulement critiqué des femmes. Afin de rétablir un peu l'équilibre, voici donc, pour le dernier album du mois, un homme et pas n'importe lequel: je parle du plus grand chanteur country de tous les temps, rien de moins! La stature impressionnante de Johnny Cash saura mettre un peu de parité dans ce spécial mensuel. Son album American IV: The Man Comes Around est paru en 2002, moins d'un an avant sa mort. Il est composé de reprises en majorité, mais quelles reprises! La forte personnalité du chanteur transparaît sur ces chansonnettes qui prennent de par leurs interprétations remarquables une dimension insoupçonnée. La profondeur et l'engagement spirituel dont témoigne cet album prouve que Johnny Cash mérite bien le titre prestigieux du plus grand chanteur de l'Histoire du country. Pourtant, Johnny Cash essaie ici de se situer plutôt dans la mouvance rock avec des reprises improbables d'artistes aussi variés et éloignés de la country que The Beatles, Depeche Mode et même Nine Inch Nails! Je ne connais aucun autre artiste country qui oserait reprendre du Nine Inch Nails sur son album. Je dois d'ailleurs glisser un mot sur ces trois reprises. Tout d'abord, celle de Hurt de Nine Inch Nails qui a fait l'objet d'un clip incroyable, un véritable petit bijou. C'est une œuvre d'art signée de la main du génial réalisateur Mark Romanek et il faut absolument avoir vu cette vidéo au moins une fois dans sa vie. L'incroyable mais excellente reprise de Personal Jesus de Depeche Mode est méconnaissable et néanmoins fort réussie, avec du piano honky tonk au lieu de synthétiseurs, c'est un véritable tour de force. Quant à la reprise de In My Life composée par The Beatles, elle donne une douceur à cet album de Johnny Cash qui serait sans cela bien rude et rugueux. Il y a presque quelque chose d'étrange dans cette reprise, tant la douceur de In My Life semble improbable dans la bouche de Johnny Cash, mais elle démontre bien la filiation populaire et rock que Johnny Cash veut donner à son album country. Il n'aurait probablement pas pu reprendre quelque chose d'aussi excentrique que la musique de l'historique album Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band (voir ma critique de Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band du 26 novembre 2011). En fait, la simplicité des arrangements de tout l'album va de pair avec la conception minimaliste de Johnny Cash. D'ailleurs, l'austérité en noir et blanc de la couverture de American IV: The Man Comes Around illustrée ici évoque bien l'atmosphère générale de l'album du chanteur. Il y a des références religieuses comme la première chanson qui est la pièce-titre de l'album et qui cite des passages tirés des Saintes Écritures de La Bible, ou Danny Boy avec son orgue d'église très ascétique qui invite à se recueillir. Il y a d'autres chansons d'une violence littéraire rare, comme I Hung My Head ou bien Sam Hall, qui sont là pour montrer que Johnny Cash n'est pas non plus un ange. La dualité entre le bien et le mal semble être un thème de cet album passionnant du début à la fin. Johnny Cash reprend évidemment aussi des pièces country (c'est après tout son style favori), telles que certaines de ses propres compositions ou encore l'interprétation du standard I'm So Lonesome I Could Cry de Hank Williams en duo avec... Nick Cave! Ça démontre bien l'envergure du personnage. American IV: The Man Comes Around de Johnny Cash est un album sérieux et tendre, simple et grandiose, émouvant et profond. Il témoigne de la hauteur de vue d'un homme qui transcende l'univers country pour se hisser dans la sphère de la culture populaire, un peu comme Elvis Presley l'a fait avec le rock'n'roll. Johnny Cash est mort le vendredi 12 septembre 2003.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 17/20

samedi 17 novembre 2018

DOLLY PARTON - Better Day

Cette semaine, j'ai pour vous une star de la chanson qui n'ait pas besoin de présentation. Vous l'avez reconnue sur la photo, il s'agit de Dolly Parton! Célèbre autant pour la générosité de son tour de poitrine que pour sa musique, la jolie blonde du country nous a offert son album Better Day en 2011. En fait, je ne connais pas tellement la discographie de Dolly Parton. Bien sûr, j'ai déjà entendu la chanson I Will Always Love You qui a été plus tard reprise par Whitney Houston mais c'est à peu près tout. Better Day est le seul album de Dolly Parton que je possède dans ma vaste discothèque et ça résume ma connaissance de l’œuvre de cette compositrice de talent. Si j'en juge d'après ce que j'ai écouté pour ma critique hebdomadaire, Dolly Parton est en effet douée pour la musique. Elle a composé elle-même toutes les chansons de son album Better Day et sa personnalité attachante transparaît sur chacune de celles-ci. Dolly Parton a voulu que son album soit positif et plein d'espoir. C'est le cas et le résultat est assez réussi. Cela ne peut pas être plus clair que sur la première chanson de l'album, la pièce In The Meantime nous invitant à cesser de craindre la mort et de plutôt profiter de la vie pendant qu'il en est encore temps. Cependant, son album visite différents styles de country, créant un curieux mélange d'ancien et de nouveau. Par exemple, la chanson Country Is As Country Does est une pièce de country entraînante et très traditionnelle où Dolly Parton se dit être country jusqu'au bout des ongles alors que le morceau Holding Everything qui suit affiche un style beaucoup plus moderne et aseptisé. C'est la même chose avec la pièce-titre qui se veut être un pastiche dans le vieux style de Ray Charles alors que la chanson qui suit, Shine Like The Sun, offre un contraste évident de par sa modernité. Une telle diversité stylistique pourrait compromettre l'unité de l'album mais le thème récurrent de l'espoir tente de rassembler l'ensemble des chansons. Je ne suis pas sûr que ce soit mission accomplie pour Dolly Parton. En outre, même dans les pièces plus actuelles, on n'a que des formules convenues et on cherchera en vain une volonté d'innover comme c'était le cas de l'album Now de Shania Twain que je critiquais la semaine dernière (voir ma critique de Now du 10 novembre 2018). Je suppose donc que Better Day ne soit pas le meilleur album de Dolly Parton, même si j'en ai tiré un certain plaisir. C'est la raison pour laquelle je ne décerne qu'une cote de 14/20 à Better Day. Ça peut sembler bien peu pour un album que j'ai aimé mais mon esprit critique doit primer avant tout. Il est assez difficile pour moi de décerner des cotes aux albums que je critique, puisque parfois je peux avoir beaucoup de plaisir avec un album que je juge pourtant faible (c'est le cas des "plaisirs coupables") ou au contraire, détester un album dont je dois reconnaître le talent ou le savoir-faire. C'est une question de goût, j'ai mes goûts et j'essaie de passer par-dessus mes goûts afin d'être objectif au moment de la critique d'un album. Bref, Better Day de Dolly Parton n'est pas un album qui passera à l'Histoire mais j'ai pu en apprécier autant la personnalité de la chanteuse que l'aspect positif et enthousiaste de la musique. Peu importe, vive le country!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 14/20

samedi 10 novembre 2018

SHANIA TWAIN - Now

Elle revenait de loin. Après avoir subi des épreuves douloureuses dans sa vie privée en plus de la maladie de Lyme qui a profondément miné sa voix, on se demandait si elle parviendrait à nous faire un nouvel album. Shania Twain nous est heureusement revenue en 2017 en pleine forme (ou presque) avec son album intitulé tout simplement Now. D'ailleurs, cet album aborde franchement ses difficultés personnelles sur des pièces comme Home Now ou Poor Me. On entend sur certaines pièces que sa voix a changé, hélas! Sur la chanson I'm Alright, elle affirme qu'elle va bien malgré tout. En tout cas, cela ne l'a pas empêchée de nous offrir un généreux album de seize chansons, si on possède comme moi la version deluxe. C'est d'ailleurs cette version que je critique ici. Shania Twain a réalisé en partie l'album et c'est son œuvre la plus personnelle, pas seulement parce qu'elle l'a déclaré en entrevue mais aussi parce que c'est celui où l'on constate qu'elle ne triche pas, qu'elle est sincère. Il y a sur Now des chansons très éloignées du country ou même du style habituel de Shania Twain, comme Where Do You Think You're Going, la presque expérimentale Roll Me On The River ou encore l'irrésistible We Got Something They Don't. Shania Twain semble partagée entre sa volonté d'aller de l'avant et de se conforter dans ce que l'on connaît déjà d'elle. En ce sens, Now est un album contradictoire. Il y a des pièces qui rappellent immanquablement son vieil album Up! de 2002, le dernier en date qu'elle nous avait présenté une quinzaine d'années avant Now (voir ma critique de Up! du 8 décembre 2012), comme c'est le cas notamment avec Soldier, alors que d'autres adoptent un son plus à la mode, comme Let's Kiss And Make Up. Il y a des chansons lumineuses et d'autres plus sombres, ce qui fait que l'on ne sait pas vraiment s'il s'agit d'un album positif ou négatif. Shania Twain essaie de faire un album amusant qui puisse plaire à ses anciens fans (par exemple la chanson Life's About To Get Good) tout en exprimant ses réflexions profondes sur la vie (la chanson All In All) et ses nouvelles influences musicales (la chanson Roll Me On The River). Il s'ensuit un album réellement étonnant. J'ai été surpris par Now, un album duquel je n'attendais rien de bien particulier. Now est un album fort agréable, même si la voix de Shania Twain laisse parfois à désirer, même si la qualité sonore n'est pas toujours au rendez-vous (la chanson Home Now semble avoir été enregistrée dans une boîte de conserve). Il est scandaleux que cet album tant attendu de la part d'une artiste internationale de la trempe de Shania Twain ait manqué de budget... C'est un album cheap et profond, divertissant et déprimant, joyeux et bizarre, j'ai de la difficulté à me faire une idée d'un tel album, certes à part dans la carrière de Shania Twain, il faut bien le dire. On reconnaît Shania Twain en même temps qu'on ne la reconnaît plus, c'est vraiment curieux. Dans l'ensemble, Now est un bon album. Les fans endurcis ne voudront pas s'en passer et je suis content de mon achat, somme toute. Il est plus intéressant que Up! que je n'avais pas tellement aimé parce qu'il était trop racoleur. Espérons que la belle Shania Twain poursuive dans sa nouvelle voie et qu'elle continue à prendre davantage de risques artistiques. Après les multiples tempêtes dans sa vie, un album courageux comme Now impose le respect. Chapeau!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 3 novembre 2018

DIXIE CHICKS - Taking The Long Way

Dans ma critique de l'album This Way de Jewel, j'écrivais que "je me suis mis à écouter du country dernièrement et vous pouvez être assurés que je vais en critiquer éventuellement" (voir ma critique de This Way du 21 avril 2018). C'est vrai et nous y sommes: je vais consacrer tout le mois de novembre à des albums country que j'ai bien aimés dernièrement. Commençons tout de suite avec mon groupe country favori, je parle bien sûr des Dixie Chicks. Leur album Taking The Long Way est paru il y a une douzaine d'années, en 2006. Il faisait suite à la controverse soulevée par une critique de la chanteuse concernant le président américain George W. Bush, un des pires présidents de l'Histoire des États-Unis, il faut bien le dire. Les Dixie Chicks s'étaient mises à dos une bonne partie de leur public composé pour la plupart par des cow-boys qui votent pour les Républicains et des « rednecks » réactionnaires du Sud... Les Dixie Chicks sont plus ouvertes d'esprit que leur public et elles ont payé le prix pour leurs paroles inspirées par l'opprobre. Cela est certes fort dommage mais par bonheur, ça nous a donné un magnifique album, Taking The Long Way. Cet album porte d'ailleurs très bien son nom car il est costaud et assez long à écouter. C'est ce qui arrive quand vous composez des chansons de cinq minutes et que vous en placez quatorze sur votre album: cela vous donne une œuvre qui frôle les 67 minutes! Il faut savoir que Taking The Long Way des Dixie Chicks se divise en deux parties: il y a tout d'abord des pièces qui font le constat de la situation après la controverse (il suffit d'écouter des chansons comme Not Ready To Make Nice pour s'enquérir de l'état d'esprit de ces chanteuses country, où elles déclarent qu'elles ne sont pas prêtes d'oublier leur mésaventure), dans un style où on reconnaît immédiatement la signature du trio féminin, puis dans la seconde moitié de l'album où l'on retrouve des morceaux librement influencés par les années '60. Cela est manifeste sur des chansons telles que Favorite Year, évoquant irrésistiblement The Beatles que j'adore et auxquels j'avais décerné une note parfaite pour leur mythique album Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band (voir ma critique de Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band du 26 novembre 2011), mais qui se termine de curieuse façon avec une erreur harmonique qui semble causée à mes oreilles, n'ayant pas la partition pour vérifier mes dires, par des octaves consécutives inexplicables dans l'ultime cadence finale qui se trouve ainsi à être complètement ratée, Voice Inside My Head qui a tout pour plaire aux vieux hippies nostalgiques du « Flower Power » ou encore I Like It dont les « pop » des chanteuses d'accompagnement sont absolument ravissants! D'ailleurs, les harmonies vocales sur cet album des Dixie Chicks sont superbes, tout comme l'instrumentation raffinée des divers morceaux que l'on retrouve sur celui-ci. Enfin, mentionnons la pièce I Hope des Dixie Chicks qui induit un peu d'espoir sur cet album dans un style rhythm n' blues évoquant les « sixties ». Il s'agit d'une œuvre magistrale, avec un degré de professionnalisme rare dans le domaine, et une qualité d'inspiration rarement égalée dans le country contemporain. Un tel commentaire artistique impose le respect, n'en déplaise aux détracteurs politiques des Dixie Chicks. L'architecture des pièces est grandiose et heureusement, la diversité musicale de Taking The Long Way ne nuit nullement à l'unité d'ensemble. Réellement, il s'agit à mon entendement d'un chef-d’œuvre parfait, ou presque... On a même droit à des moments vraiment magiques, comme la berceuse intitulée laconiquement Lullaby qui nous transporte dans le monde de notre enfance par sa musique et celui de l'amour par ses paroles. C'est vraiment un album fantastique. Je suis fier d'encourager les Dixie Chicks qui ont non seulement le talent et l'intelligence qui manquent trop souvent dans le country d'aujourd'hui, mais qui en outre n'ont pas leurs langues dans leurs poches, à l'instar de nos amis de Green Day qui avaient protesté eux aussi contre le président avec leur légendaire album American Idiot, un classique monumental de la musique rock à connaître absolument (voir ma critique de American Idiot du 27 août 2011). Bravo les Dixie Chicks, je vous adore de tout mon cœur!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 17/20