samedi 30 novembre 2019

THE NIGEL KENNEDY QUINTET - Shhh!

Je n'ai pas l'habitude de faire la critique d'albums de jazz. En fait, le seul album jazz qui me vienne en tête est cet album de Noël avec le trompettiste Wynton Marsalis, soit le fameux A Carnegie Hall Christmas Concert (voir ma critique de A Carnegie Hall Christmas Concert du 15 décembre 2018). Je ne suis pas non plus un grand connaisseur de jazz (comme tout le monde, j'ai déjà écouté Kind Of Blue de Miles Davis et je possède quelques albums de Glenn Miller) mais je suis tombé en amour avec l'album Shhh! que nous a offert le violoniste Nigel Kennedy avec son nouveau quintette de jazz trié sur le volet. Nigel Kennedy, enfant terrible de la musique classique avec un look punk controversé et des interprétations décapantes (on lui doit notamment une version ébouriffante des Quatre Saisons d'Antonio Vivaldi (1678-1741)), a sans surprise été attiré par le jazz et fondé The Nigel Kennedy Quintet dont l'album Shhh! est le résultat. L'esthétique de bande dessinée que l'on peut voir ici ainsi que la photographie à l'intérieur de l'album où tous les membres de ce quintette très particulier grimpent sur une voiture accoutrés avec des gilets sportifs de son équipe de football préféré (d'ailleurs, la mention AVFC que l'on peut lire sur la couverture signifie Aston Villa F.C.) font bien sûr partie de l'image rebelle de Nigel Kennedy qui se sent visiblement mal à l'aise avec le conservatisme qui sévit dans le milieu de la musique classique. On est ici en effet très loin de Yehudi Menuhin... Cet album Shhh! a donc été enregistré il y a exactement une décennie, en novembre 2009, mais l'album n'est paru bien sûr que l'année suivante, en juin 2010 (certains "fake news" avancent la date de 2009 pour la parution de Shhh! mais ne les croyez pas). Comme je l'ai déjà mentionné, je ne m'y connais que peu ou prou en jazz mais j'ai tout de même fort apprécié Shhh! qui est très facile d'approche, même pour un néophyte comme moi. Je dirais même qu'il est fort accrocheur, avec des structures musicales simples mais redoutablement efficaces. D'ailleurs, on a même la participation d'une star de la pop à l'ensemble puisque Boy George en personne, fameux chanteur excentrique de la formation Culture Club des années '80, nous interprète River Man de l'artiste maudit Nick Drake. Entre musiciens au look excentrique, Boy George et Nigel Kennedy doivent bien se comprendre! C'est une très belle version de River Man même si, ou peut-être justement pour cette raison, on ne reconnaît pas la voix de Boy George sur ce titre. Ailleurs, on a droit à du jazz assez tranquille comme c'est le cas par exemple de la pièce-titre, ou alors à des morceaux plus enlevés comme l'incroyable Oy! qui termine l'album du Nigel Kennedy Quintet sur une note électrisante, le mot est faible! C'est que Nigel Kennedy sort son violon électrique et nous livre un morceau virtuose et énergique qui tient plus du hard rock que du jazz! Ne cherchez pas Vivaldi ici, vous n'en trouverez pas...! Oy! est tout simplement provocant d'un point de vue classique ou même jazz. Nigel Kennedy n'est pas Stéphane Grappelli et nous le fait savoir, ça c'est clair! Quel toupet! Le violon électrique tient une grande place sur Shhh! et il est manifeste que Nigel Kennedy n'a rien à envier à Apocalyptica, groupe dont j'ai déjà critiqué de nombreux albums (vous pouvez retrouver mes critiques d'albums du groupe Apocalyptica en entrant ce nom dans le moteur de recherche de mon blog si le violoncelle électrique vous intéresse). Bref, The Nigel Kennedy Quintet semble s'adresser avant tout au mélomane de rock qui s'y connaît peu en jazz mais qui désire découvrir ce genre musical, ce qui est mon cas, puisque le fameux violoniste semble vouloir avec Shhh! démocratiser le jazz en le rendant accessible et accrocheur au plus grand nombre. Pour sa musicalité, son approche simple et facile, son énergie et son outrecuidance, Shhh! par The Nigel Kennedy Quintet est un album que je recommande absolument.

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 23 novembre 2019

LIAM LYNCH - Fake Songs

Avant les "fake news" de Donald Trump, il y avait les "fake songs" de Liam Lynch. Ce joyeux luron a fait paraître son album de facéties et de pastiches le jour du Poisson d'avril en 2003, à une époque où l'on avait bien besoin de rire après les attentats du 11 septembre 2001 et pendant la Guerre en Irak. Fake Songs est donc un album humoristique de 20 morceaux, en plus d'un DVD en bonus où Liam Lynch y va de parodies tordantes et de sketches de son propre cru. Sur le CD audio, on retrouve notamment de fausses chansons de Björk, David Bowie, Pixies, Depeche Mode et Talking Heads. Tous les styles de la culture populaire y passent, du disco avec Sugar Walkin' (qui fait bien sûr penser aux Bee Gees) au rap old school avec Rapbot, et surtout le glam rock et le hard rock des années '70. On a même droit à un satyre des prédicateurs religieux américains avec Electrician's Day où le protagoniste finit électrocuté par Dieu, un numéro absolument hilarant. Dans les circonstances, il est difficile de ne pas comparer Liam Lynch avec "Weird Al" Yankovic. Mais Liam Lynch a ceci de particulier que son album Fake Songs bénéficie du support de personnalités prestigieuses, dont un duo avec le célèbre comédien et musicien Jack Black pour Rock And Roll Whore et surtout Ringo Starr (oui, vous avez bien lu) pour deux chansons, soient Cuz You Do ainsi que Try Me! Il est difficile de croire que Ringo Starr ait collaboré avec Liam Lynch mais la portion DVD montre bien que les deux performent ensemble et que ce n'est donc pas une blague. Fake Songs culmine avec la chanson punk United States Of Whatever, une pure merveille qui a aussi produit un clip où l'on voit Liam Lynch déconner un peu comme le fera plus tard librement Billie Eilish dans son clip Bad Guy qu'on retrouve sur l'album When We All Fall Asleep, Where Do We Go? (voir ma critique de When We All Fall Asleep, Where Do We Go? du 28 septembre 2019). United States Of Whatever est plus qu'une chanson humoristique, c'est une vraie chanson punk (la seule de l'album d'une certaine façon) qui s'écoute avec plaisir et ravissement. C'est ma chanson préférée de Fake Songs, avec d'autres que j'affectionne particulièrement comme Electrician's Day, Horny Kind Of Love et la pièce qui termine fort bien cet album totalement loufoque, Sir Track. Bref, Fake Songs est plus qu'une curiosité, c'est un album vraiment cool et rafraîchissant, un petit bijou à l'humour désopilant et irrésistible. Si Fake Songs de Liam Lynch ne vous met pas un sourire sur le visage, alors vous êtes quelqu'un de vraiment funeste...

COTE D'APPRÉCIATION PRRSONNELLE: 16/20

samedi 16 novembre 2019

MY MORNING JACKET - Evil Urges

Je n'ai pas l'habitude de critiquer des albums remontant avant les années '90 mais avec l'album Evil Urges de la formation My Morning Jacket originaire du Kentucky, je me devais de vous en parler. En fait, je triche car Evil Urges est paru en 2008. Comme il est extrêmement inspiré par les années '70, je considère toutefois que c'est un album de cette époque... À part la chanson Highly Suspicious qui fait penser au tube Word Up! de Cameo paru dans les années '80 ainsi que Remnants qui évoque pour moi l'indie rock des années '90, tout l'album de My Morning Jacket aurait pu voir le jour dans les années '70. Evil Urges passe en revue tout ce qui était cool durant cette décennie, de David Bowie à Fleetwood Mac, et il est difficile d'imiter mieux les styles courants des années '70 que ce dont est capable My Morning Jacket. Lorsque j'ai acheté l'album il y a quelques années, je ne savais pas à quoi m'attendre. Le visuel de l'album me donnait l'impression d'un groupe de rock alternatif excentrique des années 2000 mais j'ai vite été dérouté à l'écoute de la musique fortement nostalgique de My Morning Jacket! On peut dire que Evil Urges était un ovni musical dans le paysage discographique de la fin de la décennie 2000 alors plus intéressée par la pop des années '80 que par le son des années '70. Il a même été en compétition aux Grammy Awards avec In Rainbows de Radiohead, faut le faire! Bien sûr, c'est tout de même In Rainbows qui a gagné (voir ma critique de In Rainbows du 14 janvier 2012). C'est donc un très bon album, notamment ma pièce favorite sur Evil Urges étant Librarian, un morceau vraiment touchant et magnifique. On compte quatorze pistes sur l'album mais il faut savoir que Good Intentions qui ferme l'album ne dure que cinq secondes! Ce n'est évidemment pas une vraie chanson. En outre, la pièce Touch Me I'm Going To Scream est scindée en deux parties, une au début et une autre à la fin, comme ça se faisait dans les années '70. Je ne saurais dire du mal de Evil Urges, excepté qu'il ressemble parfois un peu trop à un pastiche et qu'on aimerait davantage d'originalité. Ce qui a été fait dans les années '70 était certes vraiment cool mais on n'a pas besoin de copier cette décennie au 21e siècle de façon aussi scrupuleuse. Après tout, on a encore accès à la musique de cette époque, ce n'est pas comme si on l'avait oubliée et qu'on ne pouvait plus écouter les albums de ce temps-là. My Morning Jacket nous rappelle néanmoins à quel point c'était le bon temps... Souhaitons donc un retour au plus vite de cette décennie dans le Top 40 mondial avec des chansons pop ou rock à la mode influencées par les années '70! Yeah baby! The seventies are back!!

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 9 novembre 2019

PETER BJORN AND JOHN - Writer's Block

La formation Peter Bjorn And John est composée, comme son titre l'indique, de Peter, de Björn et de John. Quoi de plus simple pour se trouver un bon nom de groupe?! C'est comme Emerson, Lake And Palmer ou bien encore Crosby, Stills, Nash And Young! Vraiment, c'est pas sorcier à comprendre, il me semble! Le fameux trio suédois a connu le succès avec son album Writer's Block en 2006, surtout à cause de la fort belle chanson pop indie Young Folks. Qui n'a point fredonné la mélodie sifflée de Young Folks dans les années 2000? J'ai donc été interessé d'écouter Writer's Block mais j'ai été affreusement désappointé. Young Folks est la meilleure chanson de l'album et la seule qui mérite de l'attention, avec tout de même en seconde position Let's Call It Off. Quand j'ai écouté l'album pour la première fois, je me suis dit en effet: "Non mais putain, c'est quoi cette musique de merde?"... Cela en dit long sur la première impression que j'ai eu de Peter, Bjorn And John. Par exemple, Up Against The Wall est une longue pièce répétitive de sept minutes où il ne se passe pratiquement rien. C'est un peu la même chose pour Roll The Credits, qui dure six interminables minutes et demie. La musique est simpliste, répétitive et sent l'amateurisme. C'est du moins ce que j'en pensais avant de persévérer lors de multiples autres écoutes attentives, car j'aime donner la chance aux artistes de me convaincre de leur propos. Puis la lumière fut. Un peu comme c'est le cas de White Blood Cells, un album de la formation The White Stripes que j'avais d'abord détesté, puis réhabilité (voir ma critique de White Blood Cells du 2 février 2013), j'ai fini par sauter par-dessus mes préjugés envers l'amateurisme de cet album que je croyais calamiteux pour écouter vraiment ce qui se passe sur Writer's Block. En quelque sorte, c'est un peu comme la peinture post-impressionniste de Vincent Van Gogh (1853-1890), anti-académique de par son refus du pompiérisme qui sévissait en Europe au XIXe siècle, son rejet de la technique au profit de l'émotion pure: le minimalisme dans les moyens utilisés par Peter Bjorn And John ne l'empêche pas d'exprimer son art mais au contraire exacerbe l'expressionisme de sa musique hautement révolutionnaire... Bref, c'est pas mal bon. Je ne suis pas totalement convaincu, spécialement pour ce qui est des trois pistes en bonus de cet album de treize morceaux (la pièce-titre qui introduit Writer's Block n'est pas une chanson et ne dure qu'une quinzaine de secondes), All Those Expectations étant une pièce passablement inepte à mon avis, mais Objects Of My Affection est l'objet de mon affection pour son côté grandiose, Let's Call It Off est irrésistiblement accrocheuse (je préfère la version originale à celle qui se retrouve dans les pistes en bonus avec un traitement plus électronique) et Young Folks démontre de l'originalité. Je ne suis pas encore rendu à crier au génie comme c'est le cas d'une certaine presse spécialisée friande de ce genre de pop indie, mais j'ai quand même fini par trouver de l'intérêt pour Writer's Block, comme c'est aussi le cas maintenant de White Blood Cells. Je parle de ces deux albums car dans ma tête, ils se ressemblent beaucoup. Par exemple, la chanson Poor Cow de Peter, Bjorn and John pourrait vraiment avoir été composée par The White Stripes pour White Blood Cells. C'est l'amateurisme et le simplisme dans leur plus éminente expression. C'est donc aussi logique que je décerne la même cote d'appréciation à Writer's Block qu'à White Blood Cells. C'est une cote appréciable mais tout de même modérée. Vais-je continuer de faire remonter Writer's Block dans mon estime au fur et à mesure que je me livrerai à des écoutes supplémentaires? C'est possible que je finisse par regretter ma cote pour Writer's Block, comme je regrette déjà celle de White Blood Cells...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 16/20

samedi 2 novembre 2019

SUFJAN STEVENS - Illinois

Il n'est pas clair si l'album s'intitule simplement Illinois ou plutôt Come On Feel The Illinoise. Bien sûr, Come On Feel The Illinoise est une allusion à la chanson Cum On Feel The Noize du groupe Quiet Riot (la version originale est cependant redevable au groupe Slade mais c'est une autre histoire). C'est à peu près tout ce qui unit Sufjan Stevens à Quiet Riot car on est loin ici, avec Illinois, du heavy metal des années '80...! Comme il est indiqué que l'album de Sufjan Stevens s'intitule Illinois sur les côtés du boîtier de mon CD, je vais utiliser le titre Illinois tout simplement. C'est en effet le sujet principal de cet album où les paroles tournent autour de cet état américain. Sufjan Stevens n'était pas à ses premières armes lors de la parution de Illinois en 2005 puisqu'il s'agit du cinquième album de l'artiste. C'est un album fort long et fort complexe (il dure près d'une heure et quart), aussi je ne passerai pas en revue les 22 titres que compte cet album extrêmement ambitieux. De toute façon, plusieurs de ces titres ne sont même pas des chansons (c'est le cas notamment de A Short Reprise For Mary Todd, Who Went Insane, But For Very Good Reasons ou encore One Last "Whoo-hoo!" For The Pullman) et ne durent que quelques secondes, alors que les vraies chansons font parfois six minutes. Mentionnons que les titres des 22 pistes sont souvent humoristiques et interminables, un peu comme c'était le cas des deux albums emo From Under The Cork Tree de Fall Out Boy ainsi que A Fever You Can't Sweat Out de Panic! At The Disco (voir ma critique de From Under The Cork Tree du 15 septembre 2018 et de A Fever You Can't Sweat Out du 22 septembre 2018), parus d'ailleurs la même année que Illinois, comme quoi c'était dans l'air du temps. Pourtant, Illinois n'a rien d'emo non plus. La musique de Sufjan Stevens est éminemment originale, du moins pour la musique pop. Illinois est une sorte de croisement étrange entre l'indie rock des années 2000 et le minimalisme de Philip Glass! On retrouve sur Illinois toutes sortes d'instruments utilisés normalement dans la musique classique et il n'y a à peu près pas de guitare électrique (sauf pour The Man Of METROPOLIS Steals Our Hearts). Malgré l'apparent humour de Sufjan Stevens, il y a des pièces vraiment graves et sérieuses sur son album, notamment JOHN WAYNE GACY, JR. ainsi que THE SEER'S TOWER. Le reste est passablement jubilatoire ou extatique, parfois contemplatif, toujours intense. Il est seulement dommage qu'en raison de son esthétique minimialiste, Illinois soit quelque peu répétitif. Ce n'est toutefois qu'une question de goût personnel; on ne saurait remettre en doute le haut niveau de qualité de cet album étonnant. Il est assez évident que Illinois de Sufjan Stevens soit un des meilleurs albums de sa décennie, au même niveau que In Rainbows de Radiohead ou de n'importe quel album de Björk. Quiconque s'intéresse au folk ou à la pop indie des vingt dernières années se doit d'avoir écouté Illinois au moins une fois dans sa vie. C'est un album si riche et complexe que je ne puis développer mon argumentation davantage: cela serait effectivement trop long pour le format de ce blog. Allez écouter Illinois de Sufjan Stevens mais soyez avisé qu'il n'est pas facile pour une première écoute: il faut persévérer au-delà de la première impression, comme c'est souvent le cas de la musique classique. On est alors grandement récompensé...

COTE D'APPRÉCIATION PERSONNELLE: 18/20